Une récente proposition de loi entend renverser la charge de la preuve de l’originalité des auteurs pour assurer un procès équitable.
Le Code de la propriété intellectuelle protège les créateurs d’œuvres de l’esprit. Pour le citer : « L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous » (C. propr. intell., art. L. 111-1), et ce « quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination » (C. propr. intell., art. L. 112-1).
Ces dispositions fondent le droit d’auteur, c’est-à-dire le droit des auteurs à vivre de l’utilisation de leur travail d’une part, et à voir reconnaître publiquement et respecter leurs créations (droit à être crédité à chaque diffusion de leur œuvre, droit de refuser une diffusion, droit d’exiger que le format, la qualité, la couleur, l’intégrité de leur création soient préservés).
Or, nombreuses sont les difficultés à apparaître en cas de précontentieux ou de contentieux puisqu’il appartient à l’auteur de prouver que son œuvre est originale, et non à l’utilisateur contrefaisant de prouver qu’elle ne l’est pas. Cette charge de la preuve s’avère donc non négligeable et parfois onéreuse, notamment par le recours à des constats de commissaire de justice (ancien huissier de justice), procédures judiciaires, etc.
Surtout, cette charge probatoire ne serait pas sans porter une « atteinte au procès équitable » pourtant consacré par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et libertés fondamentales. Il n’est d’ailleurs pas anodin qu’en 2020, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) avait dénoncé ce fait, tout en proposant un remède : une nouvelle rédaction de l’article L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle.
C’est désormais chose faite sous l’impulsion de la sénatrice Sylvie Robert qui a déposé une proposition de loi en ce sens le 6 juillet 2023. Cette dernière vise à ajouter un second alinéa à l’article L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle en ces termes : « Il appartient à celui qui conteste l’originalité d’une œuvre d’établir que son existence est affectée d’un doute sérieux et, en présence d’une contestation ainsi motivée, à celui qui revendique des droits sur l’œuvre d’identifier ce qui la caractérise ».
Par ce renversement de la charge de la preuve, la sénatrice Sylvie Robert souhaite mettre en œuvre un nouveau fonctionnement : « tout d’abord, la contestation sur l’originalité d’une œuvre devra être ‘‘motivée’’ et faire naître un doute sérieux pour être recevable ; ensuite, si tel est le cas, alors le titulaire de droit devra y répondre, en présentant les éléments qui caractérisent, selon lui, cette originalité. Ainsi établie, la procédure apparaît équilibrée et respectueuse des droits de chaque partie. Les artistes-auteurs pourront de nouveau bénéficier d’une protection effective sous l’empire du droit d’auteur ».
Affaire à suivre !
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